l' Hôpital-Hospice

l'hopital au moyen age

tableau d'Adriaen Van Ostade le maitre d'école 1662

Epidemie de Choléra en 1832

à propos de la maison Baillot Charles Fichot(agrandir)

Vue du jardin interieur

les Ursulines à l'hopital

facade rue Saint Pierre

facade rue Saint Pierre

nouvel hopital en 1960 (agrandir)

La Maison-Dieu d'Ervy : des origines jusqu'à la fin du Moyen-âge

Dès la fin du XIème siècle, les hôpitaux ou hospices apparaissent dans tout l'occident.  Du fait de l'expansion du commerce, du développement des croisades et des pèlerinages, plusieurs ordres religieux construisent le long des grandes routes, des établissements chargés d'offrir l'hospitalité aux voyageurs et aux guerriers de passage. Leur vocation première est l'hébergement et la restauration des voyageurs.

Parallèlement, l'urbanisation concentra les pauvres dans les villes et l'hôpital devint progressivement un lieu d'accueil de la misère et de soutien aux faibles.

A Ervy, au cour de la forteresse médiévale, existait la Maison-Dieu dont aucun texte ne permet de connaitre l'origine ; sans doute, est-elle une évolution de la tradition évoquée dans l'article sur le jardin médiéval. En effet, les châtelaines considéraient comme un devoir sacré d'apporter leur secours aux malades et d'offrir l'hospitalité aux pèlerins fourbus.

La Maison-Dieu est mentionnée pour la première fois en 1394, dans le testament de Jean Rebours, curé d'Ervy de 1350 à 1398.

L'hôpital médiéval n'est pas, comme aujourd'hui, un lieu où l'on soigne, mais un espace institué pour réaliser l'obligation de charité, le devoir d'hospitalité et d'assistance exigé de tout bon chrétien.

Dans chaque ville, les prêtres sont invités par leurs évêques à créer soit une Maison-Dieu comme à Ervy , un Hôtel-Dieu comme à Troyes ou un Hôpital ou Hospice, avec des lits pour accueillir les pauvres, les vieux, les infirmes,les femmes en couches, les enfants orphelins ou abandonnés .

Dans le même esprit ,des maladreries sont bâties à distance des villes, pour éviter la propagation de la lèpre et autres maladies considérées comme contagieuses.

LA MAISON-DIEU : hôpital et école.

La Maison-Dieu d'Ervy est peuplée de clercs : les Pères de la Charité, qui appartiennent à un ordre pour lequel la charité revêt une importance particulière. On apprend par Jean Rebours que la Maison-Dieu est dirigée par le maitre ou le recteur Messire Jehan Jolivet, curé de Racines.

Elle est composée d'une grande salle commune qui peut recevoir jusqu'à 25 pauvres ou pèlerins; celle-ci est proche de la chapelle qui était à l'origine l'élément principal. Les soins temporels donnés à la personne accueillie ne sont qu'un moyen pour atteindre l'âme.

Comme les nécessiteux affamés et sans toit deviennent vite malades, ceux-ci sont soignés sur place par deux Soeurs-grises, qui se rendent aussi au domicile des malades dans la ville.

Le médecin ou le chirurgien ne se déplace qu'exceptionnellement à l'hôpital, pour les cas les plus graves. Les deux Soeurs sont aussi chargées de faire l'école pour les jeunes enfants.

Les Soeurs-grises sont des franciscaines qui vivent en communauté et se consacrent au service des malades. Les unes vivent de leur travail, les autres quêtent leur subsistance; elles sont en général vivement appréciées des populations.

Des écoles primaires, séparées, de garçons et de filles existaient aussi sous le contrôle de l'Hôpital. On sait qu'en 1697, Jean Louis Simard, recteur de ces écoles recevait de l'institution, la somme de 30 livres pour instruire les enfants pauvres.

Les classes des écoles primaires seront ensuite réunies jusqu'en 1820, sous la direction de l'instituteur, dans les salles de l'hôpital.

Au fond de l'impasse de l'ancien presbytère (impasse de l'Abbé Thiesson) se trouvait un collège, endroit où on suivait les classes d'humanités jusqu'à la classe de rhétorique. L'immeuble disparut au cours des siècles et les classes se firent dans les salles de l'Hospice jusqu'en 1809. Le collège fut supprimé en 1814 (sous Napoléon 1er) et remplacé par un établissement secondaire. A la fin du moyen âge, l'hôpital devient progressivement un lieu où l'on soigne à défaut de guérir ; La pharmacopée se limitant à l'utilisation des simples, les plantes médicinales, dont la connaissance provenait de la tradition populaire et des moines instruits.


LES MOYENS DE SUBSISTANCE : La charité

Au quotidien, Le problème essentiel de l'hôpital était celui de la subsistance matérielle. En plus de la charité du clergé et de celle des fidèles, de nombreux dons et legs vinrent enrichir l'hôpital, qui put subsister grâce aux revenus tirés de ceux-ci. D'après le Docteur Nicolas Jacquier (Notice historique sur Ervy), le curé Jean Rebours aurait payé pour la fondation d'un lit dans l'Hôpital réservé aux malades de la Villeneuve au chemin mais a-t-il légué tous ses biens à l'Hôpital ? Le testament, rédigé en latin, du curé Jean Rebours, à Sens le 04 févier 1394 a longtemps été conservé aux archives de l'établissement. L'inventaire, le testament suivi des comptes de l'exécuteur testamentaire composent un grand registre de 208 feuilles, avec une couverture en parchemin.

Faire son testament est une étape indispensable de la vie chrétienne à la fin du Moyen-âge; il permet de mettre en ordre ses affaires, tant morales que matérielles pour le salut de son âme et le rachat de ses pêchés. L'héritage de Jean Rebours était considérable. A son décès le 27 juillet 1399, nombreux furent les bénéficiaires car on devait veiller à ne léser personne.

En fait, L'hôpital n'occupe pas une place privilégiée dans ce testament; il ne reçut directement qu'une somme de quarante sols tournois (équivalente à 16,54 grammes d'or fin).

Cependant, jean Rebours lègue tous les biens qu'il possédait sur le finage de Montfey (et non pas tous ses biens) à Felix Faussabre, son clerc et serviteur. Ces biens situés à Montfey consistaient en divers maisons, métairies, jardins, terres, prés et tous les revenus qui s'y afféraient. Jean Rebours met plusieurs conditions à ce legs.

Les habitants d'Ervy et Felix Faussabre se conformèrent au voeu de Jean Rebours et c'est ainsi que l'hôpital hérita, via son clerc, des biens de Jean Rebours situés à Montfey.

La ferme de Plaisance que notre bon curé avait pris soin d'affermer avant sa mort, à la veuve Jehanne, dite la bergère et à ses enfants était toujours la propriété de l'hôpital, il y a encore quelques années.

Nous nous intéresserons plus particulièrement à Jean Rebours et à son testament dans la page « les personnalités », au chapitre : Jean Rebours.


Du XVIème à la Révolution

Au sortir du Moyen-âge, la plupart des hôpitaux du royaume sont ruinés à la suite de famines, des guerres incessantes et d'une mauvaise, voire d'une frauduleuse gestion des institutions charitables ; à tel point qu'il arrivait que l'on y meure de faim. L'Administration Royale dut intervenir et obtint un droit de regard, si ce n'est un droit de tutelle administrative sur l'ensemble des hôpitaux de France, qui marque le début de la gestion hospitalière par l'administration publique.

Dès le XVIIème siècle, la direction de l'hôpital d'Ervy est confiée à un administrateur laïc nommé annuellement par la population. Un édit de 1698 crée un bureau d'administration comprenant six membres et un économe : certains membres de droits et d'autres, élus. Parallèlement, on veilla à lui apporter de nouveaux revenus.

La Maladrerie, située vers la ferme des noues, n'était plus utilisée; les terres lui appartenant étaient désormais louées aux paysans voisins. Le 15 avril 1695, un arrêt rendu par le Conseil privé du Roi attribua les revenus fonciers de ces terres à l'Hôtel-Dieu d'Ervy. On sait, au travers d'un procès retentissant, que la gestion de l'Hôpital est rapidement revenue aux religieux.

En effet, en 1736,à plus de 80 ans, Edme Dupont, Marquis de Villiers , Seigneur d'Auxon, Vert,Eaux Puiseaux, Courtelon , est accueilli dans les locaux de l'Hôpital tenu par les Pères de la Charité, suite à une attaque d' hydropisie de poitrine. Il reçoit les derniers sacrements et y décède après une agonie de huit jours. Le Marquis n'a pas d'héritier direct, seulement de lointains cousins, et l'héritage est  immense.

Les curés d'Ervy et d'Auxon ne le quittent pas: ils convoquent un notaire et un testament est rédigé en grande partie en faveur de l'Hôpital. Ce testament attribue aux Pères de la Charité la valeur de 300 000 livres, alors que les héritiers n'auraient à se partager que 80000 livres.

Le procès intenté par les héritiers défendus par M Henri Cochin, écuyer et avocat au parlement est relaté dans le cinquième tome de ses mémoires; il tend à dénoncer la « suggestion » abusive exercée par les deux curés. On y apprend que « les Pères de la Charité veulent établir deux hôpitaux au lieu d'un, pour sauver l'indécence de la réunion des Pères de la Charité. et de deux Soeurs-grises dans la même maison ».

Quant au deux curés, ils ont prétendu être ainsi déchargé de tout: le soin qu'exige de leur ministère, la visite et le soulagement des malades, avoir le choix des enfants à qui apprendre des métiers quand l'hôpital serait inutile faute de malades , et avoir « l'inspection sur les Pères de la Charité pour en retirer tous le secours et les honneurs de la fondation ». On est bien loin de l'Obligation de charité prônée dans les débuts de l'institution.


APRES LA REVOLUTION

En 1793 et 1794, les fabriques, les confréries et congrégations religieuses sont dissoutes. Les hôpitaux et leurs biens sont nationalisés par la Convention ; les trois quarts des biens hospitaliers furent vendus pour financer l'effort de guerre. A Ervy, La cloche de la chapelle fut fondue, comme la plupart des cloches des églises de France et transformées en canons, celle qui existe aujourd'hui date de 1851.

Avec le Consulat et l'Empire, les hôpitaux retrouvent leurs biens, du moins ceux qui n'avaient pas été vendus, mais l'Administration publique n'avait plus les moyens de compléter leur financement. Le vieux système de la charité publique fut rétabli sous forme de fondation de lit: 500 francs par an pour un malade, 400 francs pour un incurable. Les soeurs ursulines dont la vocation est de soigner et éduquer prirent le relais.

Dès 1820, ce sont elles qui assurèrent l'enseignement de l'école primaire mais uniquement pour les filles. Les garçons, eux sont pensionnaires dans une maison de la grand-rue. Le pensionnat des filles quitte l'hôpital en 1837 pour un immeuble légué par Mlle Couvreur: le couvent. Dès lors, l'hôpital se consacre uniquement aux soins des malades et à l'hébergement des déshérités.

En 1832, l'Europe fut frappée par une pandémie de

Choléra Morbus (voir l' illustration)

qui fit environ 100 000 victimes en France.

Ervy ne fut pas épargnée; quarante-sept personnes furent prises en charge par l'hôpital. En conséquence de quoi, on dût ouvrir une seconde salle et six nouveaux lits.

En 1871, l'administration de l'Hospice d'Ervy achète la maison de la famille Baillot pour la démolir dans le but d'agrandir le jardin et de lui donner une entrée dans la rue du 11 novembre (ancienne rue du Guerillon ).

La maison natale d' Etienne-Catherine Baillot , datant du commencement du XVIème siècle et habitée de père en fils par la famille Baillot était 'la maison la plus intéressante' de la ville; par l'ensemble de sa décoration. A tel point que Charles Fichot, dans sa statistique monumentale de l'Aube (voir illustration), tome II, page 81 et 82, en a reproduit divers blasons et des fragments de sculpture sur bois appartenant aux portes ouvrant sur le jardin.

APRES LA GUERRE DE 1914-1918

Le système de charité qui régissait les hôpitaux ne résista pas à la première guerre mondiale et à l'inflation qui suivit.Le système fut entièrement réorganisé, la Sécurité Sociale fut créée et la gestion des hôpitaux fut prise définitivement en charge par le secteur public. L'hôpital d'Ervy perdit son rôle de soignant et devint  l'Hospice: lieu d'accueil pour les personnes âgées, les infirmes, les attardés mentaux.



En 1960, un nouveau bâtiment  le nouvel hôpital  est réalisé par Monsieur Petijean, architecte à Troyes, en complément des bâtiments anciens pour atteindre 115 lits. Par arrêté du 27 juillet 1985, l'hospice devient Maison de retraite.

L'établissement entreprend en 1992 des travaux d'humanisation qui durèrent 12 ans.

Aujourd'hui, la Maison de retraite  les Hauts d'Armance  est un établissement public: un EHPAD (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) qui propose 125 lits répartis dans trois pavillons (Rebours, Guyon et Hippolyte).


Sources : Testament de Jean Rebours Ernest Choullier : Ervy lettré Etienne Sprecher : Petite histoire d'Ervy le châtel Mgr P.F. Ecalle : Notes sur Ervy le châtel La vie en Champagne consacrée à Ervy

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* juillet 2017 (Odile)