LE HAMEAU DE MONTHIERAULT


Il y a bien longtemps...

Plusieurs sources, dont Henri d'Arbois de Jubainville confirment que trois tertres analogues aux Mottes existaient sur le finage de Monthierault, à proximité de de la route. Leur présence n'est plus visible aujourd'hui ; les terres ayant été répandues et aplanies par les agriculteurs; cependant leurs vestiges ont été repérées par l' archéologie aérienne. Tombes celtiques ou mottes féodales, le mystère demeure.

Consulter l'article consacré aux Mottes d'Ervy .



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Carte de Cassini 1759


carte Monthierault actuelle




cadastre napoleonien 1833


(Voir Château chinon sur la carte)

Le prieuré de Monthierault

Monthierault est aujourd'hui, un hameau d'Ervy le châtel ; mais autrefois, la cité était beaucoup plus étendue et bien plus peuplée. Le faubourg de Fontaine, comme on l'appelait alors, et le quartier de l'Armance s'étendaient de la porte Saint Nicolas jusqu'à Monthierault sans discontinuer.

En 1133, on mentionnait déjà un Monglevicem Evaudi, puis en 1151 un Monasterium Airaldi, désigné comme fief dépendant de la baronnie d'Ervy. On signale Monstier Herais, en 1553 et ensuite, le prieuré de Montierault sur la carte de Cassini du XVIIIème siècle.

Dans cette contrée se tenait un monastère composé d'une communauté de bénédictins, gouverné par un prieur. Le monastère relevait de l'abbaye de saint germain d'Auxerre; rien d'étonnant puisqu'avant la Révolution, Ervy dépendait du diocèse de Sens lequel comprenait les évêchés de Troyes, Auxerre et Nevers. Aujourd'hui, certains noms de parcelles, comme « le prieuré » et le « pré saint Germain » rappellent ce lointain passé.

Ce prieuré fut fondé au début du XIIème siècle; le pape Eugène III le prit sous sa protection en 1151, ainsi que tous les biens de l'Abbaye de Saint Germain.

On connait quelques noms de prieurs: en 1398, Guillaume de Butteaux, en 1570, Etienne Poucher, en 1602 Julien Thierrat, en 1610, Pierre Landelle, de 1628 à 1641 René Lejay, en 1710 Dom Jean Muguin , en 1778 Antoine Quatresoux de la Motte, puis en 1784, un dénommé Cotte.

Le dernier prieur de Monthierault fut, en 1790, Jean Baptiste Dubois de Crancé de Livry, sous-diacre de Reims. Il était aussi chapelain à Dannemoine. Il était prieur « commendataire », ce qui signifie qu'il pouvait se contenter d'engranger les revenus du prieuré, sans pour cela y résider. On sait que les revenus du prieuré lui rapportaient 2220 livres.

Le prieur de Monthierault, comme le curé d'Ervy, était un gros décimateur de la paroisse; c'est-à-dire qu'il avait le droit de prélever la Dime, un impôt sur les récoltes; en échange de quoi, tous deux étaient obligés d'entretenir et de réparer leurs églises respectives. Si, comme certains le prétendent, le prieuré fut détruit lors de la Guerre de cent ans, il aura été reconstruit puisqu'il existe un inventaire détaillé, daté de 1791 et établi lors de la confiscation des biens de l'Eglise.

D'après cet inventaire, le domaine du prieuré, d'une superficie de 34 hectares, comprenait une maison et ses dépendances, une chapelle et son cimetière, un moulin à eau et ses roises, mares où l'on faisait rouir le chanvre. On parle ici, du moulin de la Vacherie (Davrey) auprès duquel se trouve l'actuelle rue des chènevières (dérivé du mot chanvre). La chapelle de Mesnil saint Georges dépendait, elle aussi du prieuré.

Le cimetière populaire de la ville d'Ervy

L'église d'Ervy, à l'intérieur du château fort, était une « collégiale » ; une église réservée à un collège de clercs ou de prêtres et à la famille des Barons d'Ervy. La collégiale était le mausolée et le lieu de sépulture familial. Au fil du temps, l'honneur d'être enterré dans l'église fut ouvert aux personnes de conditions et de fonctions supérieures, qui avaient les moyens de payer une redevance considérable.

Le commun des mortels, lui, était inhumé dans le cimetière du prieuré de Monthierault. D'après les descriptions, pour aller de la chapelle du prieuré à son cimetière, on devait emprunter un pont, sous lequel passe la rivière « le saussoi », venant de « Chamblain ». On signale la présence de restes des piliers du pont au bord du ruisseau.

Les convois mortuaires venant des hameaux  des Chaillots, de la Malvoye (n'existe plus) et du Mesnil Saint Georges, en direction de Monthierault, ne passaient pas par la ville d'Ervy, mais par un chemin construit spécialement à cet usage; d'ailleurs dans les bois de Villiers, une portion était appelée: la « rue des morts ». Au lieu-dit la croix Baudriot, deux pierres étaient posées en tréteaux pour recevoir le cercueil, ce qui permettait aux porteurs de se reposer.

En 1708, ce cimetière de Monthierault fut abandonné par les ervitains.

Un nouveau cimetière fut établi temporairement au chevet de l'église d'Ervy, à l'intérieur des remparts.

La disparition du Prieuré

En 1793 et 1794, les congrégations religieuses sont interdites; leurs biens sont nationalisés et vendus par la Convention. On suppose qu'à ce moment, le prieuré a été vendu et que les bâtiments ont servi de carrière, comme dans beaucoup d'endroits; d'où une complète disparition des bâtiments que l'on peine à situer sur une carte actuelle. Parmi les 7 cloches d'Ervy, réquisitionnées en 1793, trois provenaient du prieuré. Celles-ci seront convoyées vers la Roche st Cydroine pour être ensuite transportées par voie d'eau à Paris et être fondues afin de soutenir l'effort de guerre.

Une métairie nommée Château Chinon

Au siècle dernier, Etienne Sprecher signale encore l'existence d'un vestige du prieuré ; une ancienne métairie appelée « Château Chinon » ou « Château Chignon ». C'est au XVIIème siècle que son propriétaire, François II le Bascle d'Argenteuil, la baptisa ainsi en l'honneur de sa mère Marie de Lenoucourt, Dame de Château-Chinon dans le Berry. Château Chinon est signalé grossièrement sur la carte de Cassini, puis, bien localisé sur une carte d'état-major (1820-1826) et le cadastre napoléonien de 1833; aujourd'hui, Château Chinon n'existe plus.

De nos jours, les traces de ce passé prestigieux se sont effacées et le hameau de Monthierault ressemble désormais à un quartier résidentiel d'Ervy.

Sources : Robert Cassemiche Etienne Sprecher ; petite histoire d'Ervy le Chatel Mgr Pierre-Felix Ecale : notes sur Ervy Henri D'Arbois de Jubainville * 22 février 2018 (Odile)